Attentat, catastrophe humanitaire, mouvement des gilets jaunes et, maintenant, le Coronavirus… Autant de périodes de « crise » qui ont des conséquences commerciales et économiques à plus ou moins long terme.
Pour les commerçants, plus particulièrement, une question se pose :
L’impact de ces situations de crise est-il le même pour le e-commerce et le commerce physique ?
Qu’ils soient tragiques (attentats, catastrophe humanitaire ou naturelle), sociaux (périodes électorales, mouvement social…) ou culturels (compétition sportive…), les évènements médiatiques d’envergure ont plutôt un impact à court terme sur le trafic des e-commerces. Sous le coup de l’émotion, les cyberacheteurs ont tendance à délaisser les sites de vente en ligne pour se rendre sur les réseaux sociaux et les sites d’actualité afin de suivre les évènements en temps réel.
En cas d’événement tragique, les répercussions s’étendent à plus long terme. Après les attentats de Charlie Hebdo, du 13 novembre ou de Nice, les consommateurs apeurés étaient moins enclins à sortir de chez eux, à se rendre en magasin, à faire des activités à l’extérieur ou à voyager. Les commerces physiques, hôtels et restaurants ont ainsi subi de plein fouet ce phénomène qui s’est traduit par une baisse de la fréquentation et, par effet de ricochet, une chute des ventes ou des réservations.
Avec le Coronavirus, c’est encore une toute autre situation, totalement inédite, à laquelle les entreprises, indépendants ou artisans doivent faire face. Le pays étant à l’arrêt et les commerces dit « non-essentiels » étant contraint de baisser le rideau, on peut supposer que les consommateurs n’auront d’autres choix que de se retrancher sur le web pour effectuer leurs achats et, surtout, qu’ils auront plus de temps pour le faire. Un phénomène de report des ventes des magasins traditionnels vers Internet se produira t-il ? Le e-commerce pourrait-il alors être le grand « gagnant » du Coronavirus et autres périodes de crise ?
Bien que le web représente une opportunité viable de se maintenir à flot pour les commerces implantés localement, ce n’est pas aussi évident.
Afin d’y voir plus clair, jetons donc un oeil aux répercussions sur le commerce qu’ont eu les principales situations de « crise » de ces dernières années (attentats, mouvements des gilets jaunes).
On vous propose ensuite un petit guide pour faire survivre son business en période de Coronavirus.
Impact des gilets jaunes sur le commerce de proximité
Manifestations, fermetures le samedi, barrages filtrants et blocages des accès aux magasins ont mis à mal le chiffre d’affaires de nombreux commerçants de proximité.
La première mobilisation nationale des gilets jaunes s’est déroulée le 17 novembre 2018, moins de deux semaines avant le Black Friday, opération de promotions à l’américaine qui donne généralement le coup d’envoi des achats de fêtes de fin d’année.
Après cet acte I, les manifestations se sont renouvelées tout au long du mois de décembre, puis de l’année, tant dans les grandes villes qu’en province.
En conséquence, petits commerces et enseignes de la grande distribution ont accusé le coup. L’impact de ces weekends de méventes successifs a été notable, d’autant que le mois de décembre représente habituellement la période la plus faste de l’année.
Agnès Pannier-Runacher invitée BFM TV le 22 décembre 2018
Interrogée sur le plateau de BFMTV, Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’Etat à l’Économie, évaluait alors une perte d’activité moyenne de 25% pour les commerces.
Quant à la baisse de fréquentation des boutiques, centres périphériques et centres commerciaux, elle a oscillé de 15 à 25%.
Les pertes financières ont touché tous les secteurs d’activité : boutiques de mode, hypermarchés, magasins de jouets, parfumeries, fleuristes, cavistes, hôtels, restaurants… Mais le préjudice a été d’autant plus fort pour trois typologies de commerces :
- Les commerçants spécialisés dans la vente de produits périssables, qui ont perdu leur marchandise dont ils ne pouvaient reporter la vente à plus tard.
- Les commerçants situés au coeur de la gronde, contraints de baisser le rideau certains samedis afin d’éviter les pillages et les dégradations de leurs points de vente.
- Les hôtels qui ont enduré des annulations de touristes effrayés par les images parfois violentes de certaines manifestations.
La crise des gilets jaunes a également entraîné d’autres victimes collatérales : les fournisseurs parfois dans l’impossibilité de livrer la marchandise, ou les salariés, empêchés de travailler.
Impact des attentats sur le commerce de proximité
Depuis l’attaque terroriste perpétrée contre Charlie Hebdo, la triste liste des attentats en France a engendré un difficile bilan économique.
D’après l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), l’impact des attentats sur l’économie est d’abord immédiat. Les dépenses, notamment en hôtellerie-restauration, reculent fortement dans le trimestre qui suit l’événement. Point positif : elles repartent dès le trimestre d’après ou, au pire, six mois plus tard.
Attentats contre Charlie Hebdo, à Montrouge et à l’Hyper Cacher
L’attentat contre Charlie Hebdo est survenu le 7 janvier 2015, date de lancement des soldes d’hiver 2015. Deux jours plus tard, la prise d’otages au sein de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes ajoutait encore à la psychose ambiante. Résultats ? WL Panel évoquait un recul de 17% du nombre des ventes par rapport à l’année précédente.
Attentats de Paris
Suite aux attentats de Paris, les commerces ont enregistré une baisse de chiffre d’affaires allant de 20% pour les centres commerciaux, à 25% pour les grands magasins. La semaine qui a suivi les attentats, la fréquentation des commerces de centre-ville a quant à elle chuté de 20 à 30% partout en France. Les commerces n’ont pas été les seuls impactés par les attaques tragiques du 13 novembre 2015 : c’est toute l’économie qui est restée à l’arrêt au cours des semaines qui ont suivi l’attentat. Les musées ont comptabilisé en moyenne une baisse de fréquentation de 30%. Les salles de spectacles ont perdu jusqu’à 40% de leurs spectateurs. Et dans le tourisme, partout en France, les nuitées ont diminué de 1,7% par rapport à novembre 2014 – un chiffre qui grimpe à 6,9% en Île-de-France.
Attentat de Nice
Après l’attentat qui a endeuillé la promenade des anglais le 14 juillet 2016, les commerçants, restaurateurs et hôteliers de Nice et de la côte d’Azur, mais aussi de toutes les régions touristiques de l’hexagone, ont pâti d’une baisse de la fréquentation. La Cité des anges, qui accueille chaque année 5 millions de visiteurs, a essuyé un recul de près de 20% des réservations en juillet, et de 27% en août comparé à l’année précédente. La baisse du tourisme signifie aussi moins de consommateurs potentiels, et entraîne donc également un bilan en berne pour les commerçants. Un an après l’attentat, la fréquentation touristique à Nice reprenait plus ou moins son cours normal. Mais de nombreux hôteliers ont dû pratiquer des tarifs de basse saison pour redonner de l’attractivité à la ville.
Attentat de Strasbourg
L’attentat qui a frappé, le 11 décembre 2018, le marché de Noël de Strasbourg a entraîné une nette baisse de fréquentation de l’ordre de 15% par rapport à l’année précédente. Le marché et certains commerces alentours sont restés fermés deux jours. Ils ont également souffert des annulations de touristes consécutives à l’attentat. Selon Pierre Siegel, président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) du Bas-Rhin : « Les taux d’annulation sur la première semaine étaient les mêmes que ceux qu’a connus Paris en novembre 2015 et étaient supérieurs à ceux de Nice en juillet 2016. »
Le e-commerce peut-il profiter du Coronavirus et autres périodes de crise ?
On peut supposer que oui.
Face à un sentiment d’insécurité, l’impossibilité d’accéder aux magasins, la crainte d’être contaminé et l’obligation de respecter des mesures de confinements strictes, les Français changent très probablement leurs habitudes de consommation.
C’est d’ailleurs ce qui ressort des résultats d’une enquête menée par la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) et l’institut CSA sur le comportement d’achat des Français à l’occasion des fêtes de fin d’année en pleine crise des gilets jaunes. 21% des personnes interrogées affirmaient avoir été impactées par le mouvement des gilets jaunes, soit par l’obligation de retarder l’achat de leurs cadeaux, soit par la diminution de leurs dépenses.
Pourtant, en pleine crise des gilets jaunes, les sites de vente en ligne ont réalisé 19 milliards d’euros de chiffre d’affaires sur la période de Noël, soit 2,5 milliards d’euros de plus que l’année précédente. La Poste, leader sur le marché de livraison de colis en France, affirmait avoir délivré un total de 78 millions de colis pour Noël 2018, soit 11% de colis supplémentaires par rapport à 2017.
Il convient toutefois de nuancer ces chiffres, aussi bons soient-ils.
En effet, la survenue d’un événement d’ampleur a tendance à plomber le morale des consommateurs. Sur le coup, les gens perdent l’envie d’acheter… ou préfèrent reporter leurs achats à plus tard, quand la crise passe ou s’estompe.
« L‘incertitude pousse en général les consommateurs à épargner et non à dépenser. »
Gary Becker, prix Nobel de l’économie.
Cette morosité ambiante se ressent dans les chiffres de la vente en ligne.
Ainsi, selon François Momboisse, président de la Fevad, le mouvement des gilets jaunes n’aurait pas entraîné un report massif des achats sur le web, puisque les chiffres des ventes en ligne concordait avec les prévisions établies :
« Il n’y a pas eu du tout d’explosion des ventes sur Internet […] On a constaté que les gens avaient la tête ailleurs. On avait constaté ça avec les événements dramatiques du Bataclan, il y a trois ans, quand il n’y avait pas eu d’achats dans les magasins ni sur Internet pendant 15 jours. »
Avant d’ajouter :
« La tendance (générale) est toujours à plus 14 %, c’est la tendance qu’on a depuis trois-quatre ans. Il n’y a pas un boom de la croissance, plus 25 ou plus 30, pas du tout. »
Durant la crise des gilets jaunes, le e-commerce n’aurait donc pas particulièrement bénéficié d’un report des ventes des commerces physiques.
Toutefois, bien qu’aucune hausse notable ne soit constatée en faveur du e-commerce après une telle situation de crise, le nombre de commandes effectuées sur le web continue pourtant sa nette croissance (de l’ordre de 14% par an), contrairement aux achats dans les commerces traditionnels qui déclinent. Cela s’explique en partie par le fait que les ventes en ligne bénéficient d’un retour post-crise des consommateurs plus rapide et important que les boutiques physiques.
Avec le recul, les chiffres du e-commerce post-attentat sont d’ailleurs bons. Passé le traumatisme psychologique immédiat, les semaines suivants le 13 novembre ont par exemple vu un regain de la demande pour les achats sur internet.
Ainsi, en décembre 2015, la Fevad annonçait :
« Les ventes sont clairement reparties à la hausse, il y a eu de très belles journées pour de nombreux sites, et à date, environ la moitié de nos adhérents déclarent enregistrer des progressions. »
Un enthousiasme partagé par Philippe Guilbert, directeur général du cabinet d’études Toluna, qui déclarait à l’époque :
« Ces 5 semaines [précédents Noël 2015] ont fait gagner plus 800.000 clients aux sites marchands, alors que les magasins physiques en ont perdu 2,5 millions. »
Source Google Trends – Tendances de recherche sur le mot « cadeau noel » en France de 2014 à 2018.
On observe un pic de recherche en décembre 2015.
Source Google Trends – Tendances de recherche sur le mot « cadeau noel » en Île-de-France de 2014 à 2018.
On observe un pic de recherche en décembre 2015.
Store to web vs web to store
Au regard de ces chiffres, faut-il encore rappeler qu’être présent en ligne est une nécessité ? Si nombreux ont été les commerçants à ne jurer que par une stratégie web-to-store, dorénavant, et d’autant plus en période de crise, le store-to-web est également indispensable.
Le web-to-store désignent l’ensemble des actions et dispositifs marketing mis en place sur Internet afin de diriger les clients vers le magasin physique. Le click and collect pour commander en ligne et retirer en magasin, le product locator pour vérifier la disponibilité d’un produit en boutique, une page store locator pour permettre à l’internaute de géolocaliser et connaître les horaires des différents points de vente, le référencement local, les visites virtuelles ou encore la prise de rendez-vous en ligne comptent parmi les dispositifs du web-to-store.
À l’inverse, le store-to-web consiste à utiliser le digital en boutique pour valoriser son site marchand et inciter à l’achat en ligne, notamment pour un article qui n’est pas ou plus disponible en magasin. Le store-to-web regroupe plusieurs techniques, comme l’incitation du client à commander en boutique, via son smartphone, une tablette vendeur d’aide à la vente ou une borne d’extension d’offre.
Achat en ligne vs achat en boutique : motivations et réticences
De nos jours, les trois principales raisons qui poussent les consommateurs à se rendre en magasin sont les suivantes :
- La possibilité d’essayer, voir et toucher un produit. Ils ont souvent tendance à utiliser le magasin comme un « showroom », c’est à dire pour vérifier un produit avant de l’acheter ;
- l’impatience liée au délai de livraison. Beaucoup ne veulent pas attendre avant d’avoir leur produit ;
- l’interaction et le contact humain, les conseils personnalisés du vendeur.
Quant aux réticences à acheter en magasin, elles existent bel et bien et sont probablement encore plus prononcées depuis que la France est devenue la cible d’attentats terroristes et que le mouvement social des gilets jaunes gronde.
Une étude récemment réalisée par Perifem et Opinionway sur le sentiment de sécurité dans le commerce révèle ainsi que 74% des Français craignent d’être confrontés à une scène de violence dans un commerce. Plus d’un Français sur quatre déclare même avoir déjà abandonné un achat en boutique à cause du sentiment d’insécurité. L’étude a pourtant été menée juste avant le mouvement des gilets jaunes.
Concernant l’achat en ligne, il est privilégié par plusieurs motivations :
- Éviter la foule en magasin ;
- ne pas avoir à se déplacer ;
- bénéficier d’un choix plus large.
Du côté des freins à l’achat en ligne, le sentiment d’insécurité est également bien présent sur le web, même si les craintes ne sont pas du même acabit que dans les magasins physiques.
Toujours selon l’étude Perifem/Opinionway citée plus haut, une grande majorité de Français (89%) confessent redouter de rencontrer un problème lorsqu’ils achètent sur Internet. Parmi les craintes exprimées par les sondés : la réception d’un produit endommagé, un retard ou un échec de livraison, la défaillance du service client ou le vol de leurs données de paiement.
À ce sujet, découvrez aussi nos conseils pour réduire les freins à l’achat en ligne.
Petit guide de survie à usage des commerçants en période de crise
Afin d’éviter une baisse d’activité et atténuer l’impact d’une crise sur votre business, nous vous conseillons 8 solutions destinées à engranger du trafic, réduire les réticences à acheter en ligne et ainsi favoriser les ventes sur votre e-commerce.
1 – Mettez en place des promotions en ligne : ajustez votre politique de prix en proposant des remises pour relancer les ventes.
2 – Contrez le sentiment d’insécurité en réassurant le client : sur la livraison, sur votre politique de retour et de remboursement, sur la sécurisation du paiement.
Découvrez aussi nos conseils pour une politique de retour et de remboursement efficace.
3 – Facilitez l’achat en proposant un mode de livraison express et/ou la livraison gratuite, et en travaillant votre tunnel de commande.
4 – Augmenter votre visibilité dans les SERPs en travaillant votre SEO pour la recherche locale et vocale, et en mettant en place des annonces Google Shopping.
Découvrez comment adapter votre e-commerce à la recherche vocale.
5 – Créez des campagnes Google Ads basées sur la localisation de l’utilisateur qui redirigent vers des landing pages optimisées pour la vente en ligne.
6 – Mettez un maximum d’informations sur vos produits / services grâce à l’ajout d’avis client, de description produit, de photos de bonne qualité ou même de vidéos explicatives.
Découvrez aussi comment soigner vos avis clients.
7 – Animez votre e-commerce en arrangeant votre e-merchandising pour mettre en avant les articles de saison.
8 – Mettez en avant votre service client et, si possible, un chatbot ou bot sur messenger pour répondre rapidement et efficacement à toutes les demandes clients.
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